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[Expertise] Covid-19- Haïti : Aperçu de la situation et des besoins liés à l’épidémie de coronavirus

Distribution alimentaire en Haiti en 2016 © ACTED

Présente en Haïti depuis 2004, ACTED est une ONG internationale qui répond aux urgences et soutien le relèvement des populations dans le besoin, notamment dans les domaines de l’eau, l’hygiène et l’assainissement, de la sécurité alimentaire et de la reconstruction. Avec la circulation de l’épidémie qui circule en Haïti, l’ONG appelle à la communauté internationale pour prévenir la propagation du virus et aider les autorités locales à faire face à cette crise massive de santé publique. Retour sur la situation sanitaire du pays avec Frédéric de Saint Sernin,Directeur Général Délégué d’ACTED.

1.Contexte

A la suite de l’annonce de deux premiers cas confirmés, le gouvernement haïtien a déclaré, le 19 mars 2020, l’état d’urgence sanitaire et pris une série de mesures visant à limiter la propagation du virus à travers des restrictions de mouvements et de rassemblements, dont la fermeture des écoles, des lieux de cultes, et des aéroports, ainsi que des mesures d’accompagnement des personnes. Le 19 mars 2020 une campagne de communication de masse a été activée pour informer et protéger la population.

En date du 1 avril 2020, 16 personnes avaient été testées positives dans 4 départements du pays. Les tests restent cependant très peu nombreux, et les discussions informelles avec l’OMS et les administrations sanitaires laissent penser qu’il s’agit probablement d’une sous-représentation de la situation. De plus, les tendances mondiales suggèrent que les chiffres vont augmenter de manière exponentielle. Si des mesures de prévention et de contrôle des infections ne sont pas mises en œuvre (au-delà des mesures de « quarantaine » que tout le monde ne peut pas ou ne respecte pas), le système de santé haïtien qui a une capacité de prise en charge dérisoire sera débordé. En effet si l’on se fie à l’exemple des pays d’Europe qui ont pourtant de bien meilleurs systèmes de santé, les acteurs sanitaires et humanitaires dans le pays s’accordent à dire que la situation va être catastrophique pour Haïti.

Par ailleurs, la cohésion sociale et les mesures de prévention mises en place par les autorités haïtiennes sont minées par des a priori, des rumeurs et de fausses informations concernant le COVID- 19 circulant sur les réseaux sociaux et les risques associés. En effet, les modes de propagation et de prévention n’ont formellement été communiqués et diffusés à la population qu’à partir du 19 mars. Aussi, une part non négligeable de la population ne prend pas la mesure des risques et ne respectent pas les mesures de distanciation sociale, faute d’information. La désinformation alimente aussi l’angoisse chez les populations et se traduit par des comportements hostiles envers les personnes présentant les symptômes d’une maladie respiratoire, une méfiance des personnes revenues de l’étranger, et la peur d’aller à l’hôpital et d’être stigmatisé. D’autres part, des faux-remèdes circulent sur les réseaux sociaux, et il existe encore une part importante de la population qui

En outre, d’importants mouvements de population ont été recensés à la frontière avec la République Dominicaine. Entre le 30 et 31 mars 2020 l’OIM a signalé plus de 24 318 passages de frontière entre Haïti et la République dominicaine (où 1 488 cas COVID-19 sont confirmés le 3 avril 2020). Sont comptabilisés les expulsions, les retours volontaires et les déplacements quotidiens pour acheter/vendre des marchandises, entre autres. Une augmentation des retours volontaires des Haïtiens a été observée. Bien que certaines personnes ayant traversé la frontière auraient été enregistrées avec de la fièvre à leur arrivée en Haïti, un véritable système de contrôle et de suivi fait toujours défaut.

La situation est donc très préoccupante. Ainsi, le gouvernement haïtien, les partenaires techniques et financiers, ainsi que les ONGs se sont lancés dans une course contre la montre pour préparer au mieux le pays avant le pic de l’épidémie : seaux, masques, matériaux de protection pour le personnel de santé, formation des personnes responsables de la prise en charge, état des lieux des réserves d’oxygène et des capacités de prise en charge etc. Le bilan est sans appel : Haïti se prépare à une crise sanitaire d’envergure.

2. Aperçu de la situation humanitaire et des besoins par secteur avant l’épidémie de COVID-19

Considérant la faiblesse des infrastructures et des liaisons routières en Haïti, la vulnérabilité structurelle et l’isolation de certains départements, la surpopulation d’autres zones notamment dans les zones urbaines et les bidonvilles, la difficulté de demander au plus grand nombre de la population vivant dans des conditions vulnérables d’appliquer les mesures d’éloignement social ou la quarantaine en raison de leur condition de travail et de vie, et enfin la difficulté de communiquer et de sensibiliser équitablement et largement l’ensemble de la population, le risque de morbidité et de diffusion massive de COVID-19 est d’autant plus probable que la population haïtienne est déjà affaiblie et contrainte de faire face quotidiennement à d’autres défis.

Tout d’abord, il est essentiel de souligner les faiblesses du système de santé haïtien. Ce dernier est extrêmement limité, que ce soit en termes de services, de logistique et de ressources humaines, ou en termes de structures (120 sections communales sur 574 ne disposent pas de centres de santé). Seulement quatre établissements de santé dans le pays ont été désignés pour la gestion des cas de COVID- 19 jusqu’à présent, et le pays compte moins de 200 lits disponibles pour 11 millions d’habitants.

Par ailleurs, les derniers épisodes de « Peyi lock » (phénomène de paralysie du pays) en 2019 ont fortement mis à l’épreuve le pays et en particulier les structures de santé (hôpitaux, centres de santé) qui ont connu des pénuries importantes (eau, intrants, équipements) affectant directement leur fonctionnement et leurs capacités de réponse.

Ensuite, l’accès à l’eau potable, à l’assainissement et à l’hygiène reste une des préoccupations majeures. Haïti se remet à peine de 10 ans d’épidémies de choléra. Et force est de constater que près de 60% des ménages disposant d’un point de lavage des mains n’utilisent ni savon ni aucun autre produit de nettoyage (EMMUS IV 2018). Cela réduit la possibilité de pouvoir suivre les règles d’hygiène préventives au quotidien pour éviter de contracter le virus.

Par ailleurs, il est important de souligner la crise alimentaire et nutritionnelle que le pays traverse en permanence, avec près de 4,10 millions de personnes (soit 40% de la population) identifiées à ce jour comme étant en situation d’insécurité alimentaire aiguë (IPC3 et plus) selon l’analyse de la CNSA. Cette situation pourrait être aggravée par la période de soudure et la saison des ouragans qui débutera en juin 2020. Dans un tel contexte, de nombreuses personnes survivent en cultivant leur terre et en vendant leurs produits sur des marchés surpeuplés où il est difficile de respecter la distance sociale et les normes d’hygiène. Sans compter que l’épidémie pourrait avoir des conséquences sur les marchés (difficulté d’approvisionnement) ce qui pourrait engendrer une inflation des prix.

La pandémie en Haïti aura également de graves conséquences pour les groupes les plus vulnérables, notamment les personnes handicapées, les personnes âgées, les victimes de violences, d’exploitation et d’abus sexuels (en particulier pendant le confinement), les détenus (la suspension des visites empêche les familles de compléter les rations alimentaires) et les enfants non scolarisés.

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Auteur : Eline Ulysse

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