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Municipales 2020 : En Guyane, une lutte fratricide pour la mairie de Ouanary

La mairie de Ouanary ©Florian Royer

À Ouanary, commune de l’est guyanais uniquement accessible en pirogue ou en hélicoptère, deux candidats se disputent le siège de maire : les frères Éric et Narcisse Rozé. Une lutte politique sur fond de brouille familiale et de lutte fratricide se joue dans cette enclavée de quelques 200 habitants et 70 électeurs.

Il faut marcher longtemps dans Ouanary avant d’apercevoir âme qui vive. Les étroits chemins goudronnés qui font office de rues ne sont pas très fréquentés. Jacques Rozé, fils de l’opposant au maire sortant, assure la visite. Il tient à montrer le gîte, qui n’accueille plus de touristes, l’église, désertée par les fidèles et l’école avec son unique élève. Tous ces bâtiments tombent en ruines et appartiennent aux araignées et aux chauves-souris. Seuls la mairie (vide) et le bloc sanitaire (verrouillé) sont de facture récente.

Jacques Rozé fulmine en montrant ce qu’est devenu la commune de son enfance. « Les anciens quittent Ouanary », regrette-t-il, « ils se rapprochent de Cayenne, où le suivi médical est plus simple ». Ici, pas de médecin, une permanence au dispensaire de temps en temps. Aussi, quelques jours avant la clôture des dépôts de candidatures, Narcisse Rozé, le père de Jacques, a officialisé sa décision : il présente une liste contre le maire sortant. Celui qui achève sa mandature et en brigue une nouvelle, c’est Éric Rozé, maire depuis 25 ans et frère cadet de Narcisse. Ce dernier a été son adjoint au conseil municipal durant les premiers mandats, avant de couper les ponts.

La centrale à fioul qui alimente Ouanary en électricité ©Florian Royer

La centrale à fioul qui alimente Ouanary en électricité ©Florian Royer

Pour rencontrer Narcisse Rozé, il faut se rendre à l’abattis en bordure du bourg, où il passe le week-end avec ses enfants et son petit-fils (l’unique élève de l’école). Le septuagénaire ne tarit pas de critiques sur la politique de son frère. « J’ai vu dépérir Ouanary », affirme-t-il en créole, et ajoute : « il se fiche pas mal de notre sort ». Pour lui, son cadet s’est approprié la commune et la considère comme son bien personnel. Il s’est débrouillé pour donner les emplois à ses proches, selon l’entourage de Narcisse. Le ramassage des ordures, géré par la communauté de communes, était jusqu’à récemment, attribué au fils d’Éric Rozé. « Mais le travail n’était pas fait », souligne Jacques, en montrant des sacs d’ordures éventrés sur la voie publique.

Le maire sortant, éreinté par son frère, travaille près de Cayenne, où il vit avec sa famille. « On ne le voit jamais », soupirent Narcisse et son entourage. Il est vrai qu’il est difficile à contacter. Absent le jour du reportage, Éric Rozé ne décroche jamais son téléphone. « On ne l’a quasiment jamais vu aux réunions de l’association des maires de Guyane », confie l’édile d’une autre commune. Lors de sa déclaration de candidature, il a accordé une interview à Guyane la 1ère. Il y affirme avoir été sollicité pour se représenter et défend son bilan : « la voirie, trois châteaux d’eau en hauteur, le gîte rural et le bloc sanitaire ». Pour les six ans à venir, il promet de travailler sur « le repeuplement de la commune et un développement agricole », avec l’installation de familles hmongs. Éric Rozé interpelle aussi Rodolphe Alexandre, le président de la collectivité territoriale, sur l’urgence de désenclaver Ouanary.

Une décharge sauvage, l'un des problèmes que Narcisse Rozé veut éradiquer ©Florian Royer

Une décharge sauvage, l’un des problèmes que Narcisse Rozé veut éradiquer ©Florian Royer

« Il s’agit d’une affaire uniquement politique, il n’y a rien de familial », assure Alain Mesmin, colistier de Narcisse Rozé et membre du conseil municipal sortant. Parmi les buts de Narcisse, donner à Ouanary un dynamisme touristique. Une première impulsion avait été donnée quelques années auparavant, des balises avait été posées au bord des chemins, un petit hôtel (géré par Narcisse et son épouse) était sorti de terre, mais la tentative n’avait pas fait long feu. Alain Mesmin poursuit : « on pense aussi à commercialiser les produits de Ouanary : couac, bananes, dokonons ». Mais le temps nécessaire pour aller les vendre à Cayenne, une heure de pirogue jusqu’à Saint-Georges puis deux heures de route, met un sérieux coup de frein à ces idées. L’unique société locale proposant des trajets entre Ouanary et Saint-Georges en pirogue appartient à Jacques Rozé.

Les deux frères brouillés poursuivent le même dessein : faire revivre Ouanary et y ramener les jeunes, mais avec des moyens différents. C’est aux quelques 70 électeurs inscrits sur les listes de la commune de dire s’ils accordent un nouveau mandat au maire sortant ou s’ils préfèrent voir son frère prendre le fauteuil de maire.

FR.

La fabrication artisanale du couac, un des atouts de Ouanary ©Florian Royer

La fabrication artisanale du couac, un des atouts de Ouanary ©Florian Royer

 

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Auteur : J.-T

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